L’armurerie

par Frédéric Benhaim


Allure années 80. Aspect Rocky. Son Balavoine. ARMURERIE, au-dessus de la vitrine, sur un bandeau blanc, est écrit en lettres bleues, dans des caractères passés de mode.

La Révolution, lit-on, a commencé par la prise des armureries. Ce magasin contribue à l’équipement populaire. En Syrie, en Libye, et ailleurs, la révolution s’est faite par les armes. Encore. L’Inde est un contre-exemple, certes, idem la Tunisie, idem la Tchécoslovaquie….mais on remarquera que ce n’était pas une révolution.

Dans les vitrines, sur les étals, toutes sortes d’armes : automatique, semi-, mais aussi quelques armes de guerre, qui servent plus à attirer le chaland et le curieux dans le monde violent du refus de subir.  Couteaux, dagues, couteaux suisses même, opinels, haches, style chasseur ou para, mais aussi boussoles. Tous s’arrrêtent sur la kalachnikov. L’arme à feu s’adresse au chasseur, donc, au collectionneur, au fasciste et à la racaille envieuse. Le petit caïd vient baver son tour. Quelques mafieux, mais aussi des gens respectables, oui, le commerce des armes est un commerce respectable, qui emploie en France et soutient l’industrie. D’ailleurs acheter du pistolet c’est acheter Français. Sans la poudre, nous n’aurions pas conquis l’Amérique.

Des couteaux en toutes sortes, exposés comme des dents de requins chez un vieux loup de mer, ornent les murs supérieurs. Une tête d’ours empaillée, achetée chez un antiquaire. (N’est pas à vendre.) Des munitions, des balles, quelques curiosités pour les médiévistes, les néo-Druides et les simulateurs de batailles.

La vendeuse est très sympathique. Créoles, cheveux blonds avec extensions, marcel noir Métallica, mais parfois, elle vient en tailleur.

Une ou deux femmes désireuses de tuer leur mari ou leur amant sont déjà passées. Un ou deux beaux-pères. Un ou deux gendres pas tout à fait idéaux. On a soupçonné des hommes en noir qui semblaient bien sous tout rapport.

Heureusement la police surveille ; il y a des permis, tout va bien, tout est en règle, nous sommes en sécurité. Ici, au moins, c’est légal et contrôlé.