La graineterie

par Frédéric Benhaim

A ma connaissance, dit le voisin du dessus, c’est la dernière boutique de ce genre dans la région. Ici, dans la rue assez calme, siège la graineterie, petit temple des semences et des bulbes. Pas besoin de vous rendre en zone industrielle, tant que je suis là, vous dit cette vitrine. Vos fleurs de balcons, votre potager a encore de quoi s’améliorer ici.

Autrefois, dans la même rue, il y avait une mercerie, un quincailler, et dans le quartier, une droguerie. Maintenant, des chaînes de vêtements. Mais la graineterie résiste.

Ca se présente ainsi : une vitrine transparente qui donne sur le magasin. Une enseigne des années 50, écriture cursive, au-dessus de la porte ; un rouge un peu délavé sur un fond blanc. Dedans il y a une grande table centrale avec des sacs à bulbes et tout le long des murs des présentoirs. Là, à gauche, ce sont les fleurs ; au fond, les plantes pour le potager ; à droite, des plants, quelques uns, même si ici, on n’est pas non plus pépiniériste. C’est tout simple, mais il y a ce qu’il faut : engrais, plantes, bulbes, graines. Au-dessus des sacs et des boîtes, de petites images cartonnées et des étiquettes où on a écrit au feutre les noms savants et vulgaires. Et si tu essayais celui-là ? C’est vrai que je ne l’ai jamais planté… J’en vends moins depuis quelques années, pourtant ça reste beau. Oui, tu as raison, c’est joli sur la photo. Il faut beaucoup arroser, après tu verras, c’est impeccable, et ça tient jusqu’à l’hiver. C’est que les hivers sont rudes…

Quel est le sens de pouvoir tout acheter en centre ville, après tout ? Je ne sais pas, répond le voisin, qui vous a renseigné, car la boutique est fermée ; en tout cas, pour mes géraniums (c’est là que vous les apercevez, à la fenêtre, juste au-dessus), je suis drôlement content.

Le 5 janvier 2015. Bonne année.