La para-pharmacie

par Frédéric Benhaim

 

            Non remboursés par la Sécurité sociale, ses produits sont néanmoins « indispensables ». Tout simplement. L’épilation obligatoire du mollet à la cire de Guarnica, le frotte-dos sensation fraîcheur, ou les spray désaltérants pour les plantes de pied ne doivent rien au hasard.

A côté des crèmes de rasage, à côté des parfums pour les personnes âgées, au-dessus des compléments alimentaires, il y a le monde. Le monde qui se déploie en saveurs, sensations, et parfums. En huiles essentielles et essences exotiques. En extraits, en morceaux, en granulés, en écrasé mêlé à la crème. En crème froide (cold) et chaude (hot). En gelée, en gélules, en pilules, en suppositoire. (Le suppositoire, dit-on, fait un grand retour.) La France, dit-on aussi, a inventé la cosmétique ; ici c’est le génie français qui a recyclé le monde. Le monde qui vient à vous par la peau, ou par la bouche, c’est très français. Mangez-le, frottez-le, il sera en vous, et vous êtes en lui.

La parapharmacie est blanche, à l’intérieur, bleu-gris et rose, pastels. Des dalles blanches au sol ; le personnel porte la blouse. N’entendez pas para-.

Les personnes de tout âge se pressent pour profiter des soldes, des occasions. Des offres. Une bouteille de cold cream offerte avec l’autre, et un coupe-ongles lime légèrement massant. Un shampooing assorti à un kit de beauté. Des boîtes de compléments alimentaires pour prolonger le dosage, dans le temps. Lisser l’effet. Saupoudrer, avec délicatesse, masser, et découvrir que dans le corps tout importe. Notamment ce que vous aviez oublié. Les gencives, les poils, le revers de la main, la peau du cou. Tout cela se soigne. Se dorlote.